LET'S MAKE SOME ART
LET’S MAKE SOME ART
Tu veux percer dans le « milieu des arts visuels » mais tu ne possèdes pas la culture nécessaire et tu n’as pas d’amis gais ou galeristes? (Peut-être même crois-tu encore qu’un « galeriste » est quelqu’un qui répare des balcons?) Arrête de te prendre la tête. Voici une technique infaillible pour devenir « un jeune créateur prometteur dans le domaine des arts plus ou moins de pointe » Je vais t’enseigner tout ça en utilisant l’exemple.
1- Tu n’as pas besoin de talents particuliers. Si tout ce que tu sais dessiner c’est des petits bonshommes avec des faces qui rient, ne te sens pas exclus ou diminué. Oh! On vit à l’ère de l’informatique et de la « démocratisation des moyens de production. »
2- Pas besoin de grands moyens ou de logiciels performants. Un logiciel de base, rudimentaire, fera l’affaire. De toute façon, tu n’auras à dire au galeriste que tu t’inscris parmi les « artistes minimalistes tendance post-pop »et le tour sera joué (ou évoque un peu Dada, si tu sais c’est quoi.)
3- Pas besoin d’avoir une idée, un projet, un plan. Quand tu auras achevé ton « chef-d’œuvre », tout le travail sera à faire (mais je suis là pour te conseiller, éponger ta sueur d’artiste et te prodiguer des caresses intimes.)
4- Visite régulièrement Google Image. Cherche N’IMPORTE QUOI et calice les images intéressantes (ou plates, who cares) dans un dossier approprié.
Exemple (voir « chef d’œuvre » ci-dessus.)
1-Par un hasard extraordinaire, en fouillant le catalogue Internet des magasins IKEA à la recherche de meubles à prix modiques, je trouve cette image de boîte industrielle. « Ça pourra me servir un jour », me suis-je dit avant de sauvegarder ladite image dans mes dossiers et de retourner tranquillement à www.dirty-panties-heaven.org
2-Un mois plus tard, encore par hasard (en cherchant Dieu sait quoi cette fois), je trouve ces autres images. Oui, des hosties de hiéroglyphes. (Remarquez ici que je n’ai absolument rien à chier de l’Égypte antique et que mon savoir sur cette civilisation se résume à ce que j’ai vu dans Astérix et Cléopâtre.)
3- Seul un mongolien, un lofteur ou un fan des Têtes à claques ne serait pas frappé par la vague similitude de ces trois images. Je les colle toutes ensemble vite fait. Voilà, le miracle s’est accompli. J’ai entre les mains une œuvre « riche de sens. »
4-C’est maintenant le moment de se torturer les méninges. D’abord trouver un titre chiant, mais pas trop compliqué (on ne voudrait pas passer pour un artiste « hermétique », n’est-ce pas?) Me souvenant vaguement de mes rares cours d’histoire de l’art (tous échoués), j’ai trouvé le titre « savant » ARCHÉOLOGIE DU SIGNIFIÉ # 1 (il faut toujours accoler un numéro au titre de l’oeuvre, ça fait « recherches. ») Si ton expérience concrète avec une œuvre d’art, c’est l’observation blasée d’un poster laminé de Van Gogh accroché dans les toilettes, ce n’est pas grave. Fais deux ou trois recherches sur Google, trie des mots, visite des sites plates d’expositions parrainées par le Conseil des arts et fie-toi à ton instinct.
5-À présent, trouve un sens au chef-d’œuvre, car en plus d’exiger certains services « très particuliers », le galeriste te demandera d’expliquer ta « démarche artistique » et de te situer par rapport à telle ou telle école de pensée. En dix minutes j’ai développé le concept de IKEART (habile jeu de mots), à savoir l’art qu’il faut monter soi-même (fais toujours ton « petit comique », les jeunes galeristes branchés aiment ça et ils t’éviteront peut-être certains touchers désagréables.) Mais IKEART, c’est du « sérieux » en vérité mon ami! Oui, il y a un « concept. » IKEART c’est un projet!
(Yeah! Right! Cut the shit, Zhom!)
6- Non, non, non, je ne vais pas m’étirer pendant quinze paragraphes sur la naissance de la civilisation du signe en Mésopotamie, on s’en sacre et je n'ai même pas de DEC. Mais, ne vivons-nous pas dans un monde où le signe, le symbole, perd de sa signification première à force de surexposition pour n’être plus que son propre signe? (Du blabla dans le genre. Si tu dois t’expliquer de vive voix, hésite souvent entre deux phrases, dis que tu es un artiste instinctif, pas un intellectuel (ce qui est vrai en plus), un « observateur du monde banal qui nous entoure et qu’on ne voit plus à force d’y être plongé » ou whatever. Ou ne dis rien et essaie d’avoir l’air intense, les jeunes galeristes branchés aiment ça et ils t’éviteront peut-être des etc.
Enough of this crap. I’m done…
Tu veux percer dans le « milieu des arts visuels » mais tu ne possèdes pas la culture nécessaire et tu n’as pas d’amis gais ou galeristes? (Peut-être même crois-tu encore qu’un « galeriste » est quelqu’un qui répare des balcons?) Arrête de te prendre la tête. Voici une technique infaillible pour devenir « un jeune créateur prometteur dans le domaine des arts plus ou moins de pointe » Je vais t’enseigner tout ça en utilisant l’exemple.
1- Tu n’as pas besoin de talents particuliers. Si tout ce que tu sais dessiner c’est des petits bonshommes avec des faces qui rient, ne te sens pas exclus ou diminué. Oh! On vit à l’ère de l’informatique et de la « démocratisation des moyens de production. »
2- Pas besoin de grands moyens ou de logiciels performants. Un logiciel de base, rudimentaire, fera l’affaire. De toute façon, tu n’auras à dire au galeriste que tu t’inscris parmi les « artistes minimalistes tendance post-pop »et le tour sera joué (ou évoque un peu Dada, si tu sais c’est quoi.)
3- Pas besoin d’avoir une idée, un projet, un plan. Quand tu auras achevé ton « chef-d’œuvre », tout le travail sera à faire (mais je suis là pour te conseiller, éponger ta sueur d’artiste et te prodiguer des caresses intimes.)
4- Visite régulièrement Google Image. Cherche N’IMPORTE QUOI et calice les images intéressantes (ou plates, who cares) dans un dossier approprié.
Exemple (voir « chef d’œuvre » ci-dessus.)
1-Par un hasard extraordinaire, en fouillant le catalogue Internet des magasins IKEA à la recherche de meubles à prix modiques, je trouve cette image de boîte industrielle. « Ça pourra me servir un jour », me suis-je dit avant de sauvegarder ladite image dans mes dossiers et de retourner tranquillement à www.dirty-panties-heaven.org
2-Un mois plus tard, encore par hasard (en cherchant Dieu sait quoi cette fois), je trouve ces autres images. Oui, des hosties de hiéroglyphes. (Remarquez ici que je n’ai absolument rien à chier de l’Égypte antique et que mon savoir sur cette civilisation se résume à ce que j’ai vu dans Astérix et Cléopâtre.)
3- Seul un mongolien, un lofteur ou un fan des Têtes à claques ne serait pas frappé par la vague similitude de ces trois images. Je les colle toutes ensemble vite fait. Voilà, le miracle s’est accompli. J’ai entre les mains une œuvre « riche de sens. »
4-C’est maintenant le moment de se torturer les méninges. D’abord trouver un titre chiant, mais pas trop compliqué (on ne voudrait pas passer pour un artiste « hermétique », n’est-ce pas?) Me souvenant vaguement de mes rares cours d’histoire de l’art (tous échoués), j’ai trouvé le titre « savant » ARCHÉOLOGIE DU SIGNIFIÉ # 1 (il faut toujours accoler un numéro au titre de l’oeuvre, ça fait « recherches. ») Si ton expérience concrète avec une œuvre d’art, c’est l’observation blasée d’un poster laminé de Van Gogh accroché dans les toilettes, ce n’est pas grave. Fais deux ou trois recherches sur Google, trie des mots, visite des sites plates d’expositions parrainées par le Conseil des arts et fie-toi à ton instinct.
5-À présent, trouve un sens au chef-d’œuvre, car en plus d’exiger certains services « très particuliers », le galeriste te demandera d’expliquer ta « démarche artistique » et de te situer par rapport à telle ou telle école de pensée. En dix minutes j’ai développé le concept de IKEART (habile jeu de mots), à savoir l’art qu’il faut monter soi-même (fais toujours ton « petit comique », les jeunes galeristes branchés aiment ça et ils t’éviteront peut-être certains touchers désagréables.) Mais IKEART, c’est du « sérieux » en vérité mon ami! Oui, il y a un « concept. » IKEART c’est un projet!
(Yeah! Right! Cut the shit, Zhom!)
6- Non, non, non, je ne vais pas m’étirer pendant quinze paragraphes sur la naissance de la civilisation du signe en Mésopotamie, on s’en sacre et je n'ai même pas de DEC. Mais, ne vivons-nous pas dans un monde où le signe, le symbole, perd de sa signification première à force de surexposition pour n’être plus que son propre signe? (Du blabla dans le genre. Si tu dois t’expliquer de vive voix, hésite souvent entre deux phrases, dis que tu es un artiste instinctif, pas un intellectuel (ce qui est vrai en plus), un « observateur du monde banal qui nous entoure et qu’on ne voit plus à force d’y être plongé » ou whatever. Ou ne dis rien et essaie d’avoir l’air intense, les jeunes galeristes branchés aiment ça et ils t’éviteront peut-être des etc.
Enough of this crap. I’m done…
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